Histoire de l’Église
Newel K. Whitney et la Firme unie


« Newel K. Whitney et la Firme unie », Révélations dans leur contexte, 2016

« Newel K. Whitney et la Firme unie », Révélations dans leur contexte

Newel K. Whitney et la Firme unie

Doctrine et Alliances 70, 78, 82, 92, 96, 104

Newel K. Whitney

En avril 1834, Newel K. Whitney, évêque de l’Église à Kirtland (Ohio) et homme d’affaires prospère, remit plus de trois mille six cents dollars de dettes à plusieurs personnes, dont Joseph Smith, Sidney Rigdon et Oliver Cowdery. Ces dettes s’étaient accumulées au fil de deux années au cours desquelles les hommes avaient travaillé ensemble à diriger et financer les affaires temporelles de l’Église dans un organisme administratif appelé la Firme unie. Au bout de deux années tumultueuses, la Firme unie devait être dissoute. L’évêque Whitney déclara : « Joseph dit que la volonté de Dieu [est que les comptes soient soldés] totalement, sans dédommagements ». Il s’engagea alors à faire ce que Joseph avait demandé1.

Dès le début du rétablissement de l’Église, le Seigneur confia à Joseph Smith des tâches dont la réalisation exigeait des moyens matériels. Ce fut, par exemple, avec le soutien financier de Martin Harris que le jeune prophète publia le Livre de Mormon. Au fur et à mesure de l’accroissement du nombre des membres de l’Église, l’ampleur de sa mission révélée grandit également. L’édification de communautés de Sion nécessitait des terres et des ressources. La proclamation au monde de l’Évangile rétabli nécessitait l’accès à une presse d’imprimerie. La Firme unie fut fondée pour coordonner et financer ces efforts ambitieux.

Newel K. Whitney fut présent lors de la dissolution de la Firme unie, comme il le fut lors de sa création. En qualité d’évêque, il assista à une réunion de grands prêtres à Kirtland en mars 1832. À cette occasion, Joseph Smith, le prophète, reçut une révélation (maintenant Doctrine et Alliances 78) qui commandait à Joseph, Sidney Rigdon et l’évêque Whitney de se rendre au Missouri pour superviser la création d’une « organisation des établissements de commerce et d’édition de mon Église2 ». À l’époque, Sidney Gilbert, agent de l’évêque Partridge à Independence, au Missouri, gérait un magasin en faveur de l’Église, et le magasin de l’évêque Whitney à Kirtland était aussi appelé le magasin de l’Église.

De plus, William W. Phelps, l’imprimeur de l’Église, avait fondé une imprimerie à Independence, où il imprimait un journal et préparait la publication d’une compilation des révélations de Joseph Smith en un livre appelé Livre des Commandements. Pour superviser la publication de ce livre, une révélation datée de novembre 1831 (maintenant Doctrine et Alliances 70) désignait Joseph Smith, Sidney Rigdon, Oliver Cowdery, John Whitmer, Martin Harris et William W. Phelps comme « intendants des révélations », déclarant qu’ils seraient dédommagés pour leur travail par les bénéfices tirés de la vente du livre3. Maintenant, en mars 1832, le Seigneur disait à Joseph Smith et aux autres que le fonctionnement de l’imprimerie et des magasins devait être coordonné.

Pendant la première semaine d’avril 1832 (quelques jours à peine après que des émeutiers eurent attaqué Joseph Smith et Sidney Rigdon, entraînant la mort du fils adoptif de Joseph, Joseph Murdock), Joseph Smith, Newel K. Whitney, Sidney Rigdon et plusieurs autres personnes partirent pour Independence pour exécuter cet ordre4. Le 26 avril, peu après son arrivée au Missouri, le prophète convoqua un conseil de grands prêtres. Lors de cette réunion, Sidney Rigdon lut au conseil la révélation de mars 1832, déclarant qu’elle indiquait « la raison pour laquelle il nous a été commandé de venir dans ce pays et de tenir conseil avec les grands prêtres qui s’y trouvent ». Une révélation fut alors donnée à Joseph, exposant plus clairement ce qu’ils devaient faire5.

Dans sa forme originale, cette révélation déclarait qu’il était « opportun » que Joseph Smith, Sidney Rigdon, Newel K. Whitney, Edward Partridge, Sidney Gilbert, John Whitmer, Oliver Cowdery, William W. Phelps et Martin Harris « soient liés les uns aux autres, dans leurs intendances respectives, par un engagement et une alliance qui ne peuvent être rompus, pour gérer les affaires commerciales et d’édition et les épiscopats, tant dans le pays de Sion que dans le pays de Kirtland6 ». La révélation, maintenant Doctrine et Alliances 82, déclarait aussi que ces neuf personnes devaient « avoir des droits égaux sur les propriétés, dans l’intérêt de l’administration des affaires de [leurs] intendances ». Elle déclarait que le Seigneur avait prévu que cette « firme » soit une « firme éternelle pour [eux] et pour [leurs] successeurs7 ».

De plus, la révélation disait aux hommes de se « lier » les uns aux autres par une alliance « conforme aux lois du pays8 ». En résumé, la révélation disait à ces membres de la firme que leur gestion des établissements commerciaux et de l’imprimerie leur permettrait de pourvoir à leurs besoins et à ceux de leurs familles et qu’ils devaient s’associer légalement pour faire face à leurs obligations à l’égard des dettes de la firme.

Le conseil se réunit de nouveau le lendemain et décida que les deux branches principales de la firme seraient Gilbert, Whitney & Co. (le partenariat commercial de Newel K. Whitney et de Sidney Gilbert à Independence) et N. K. Whitney & Co. (la firme de l’évêque Whitney à Kirtland). Ils chargèrent également William W. Phelps et Sidney Gilbert de rédiger les clauses de la convention à laquelle les membres de la firme devaient s’engager comme le demandait la révélation9. À peine quelques jours plus tard, autour du 1er mai 1832, la Firme unie tint sa première réunion, avec tous ses membres à l’exception de Martin Harris. Lors de cette réunion, Newell et Sidney furent « nommés agents pour agir au nom de la Firme » et il fut commandé à la firme d’obtenir un prêt de quinze mille dollars par l’intermédiaire de N. K. Whitney & Co10.

Pendant les deux années qui suivirent, la Firme unie joua un rôle prépondérant dans la gestion de l’Église. En plus de superviser les magasins et l’imprimerie, ses membres servaient de conseil d’administration de fait pour Joseph Smith. Par exemple, lorsque Joseph, resté en Ohio, voulait des renseignements sur ce qui se passait au Missouri, où la ville de Sion était en cours d’établissement, il adressait des lettres aux membres de la firme11. De même, les capitaux de la firme devinrent essentiels au financement des projets de l’Église et à l’entretien de base des membres de la firme et de leurs familles.

En 1833, deux membres supplémentaires furent ajoutés à la firme, tous les deux par révélation. L’une reçue en mars 1833 (maintenant Doctrine et Alliances 92) commandait que Frederick G. Williams soit reçu « dans la firme » et qu’il en soit un « membre actif12 ». Ensuite, en juin 1833, une autre (maintenant Doctrine et Alliances 96) commandait que John Johnson « devienne membre de la firme afin d’aider à faire parvenir ma parole aux enfants des hommes13 ». Frederick, membre de la présidence gouvernante de l’Église, possédait de grandes propriétés foncières en Ohio, tout comme John. La Firme unie mettait à contribution les biens de ces hommes pour gérer ses intendances.

Pendant ce temps, Newel K. Whitney était toujours impliqué dans la firme. Outre le fait que son magasin à Kirtland servait de magasin de l’Église, Newel devint responsable de dettes encourues pour l’achat d’un grand terrain à Kirtland où les dirigeants de l’Église avaient l’intention de construire la maison du Seigneur14. Grâce aux ressources de son magasin, Newel fournit également les fonds et les marchandises nécessaires à l’entretien de Joseph Smith et d’autres, générant les dettes qu’il allait remettre en avril 1834.

Cependant, en 1834, la Firme unie était financièrement chancelante. Lorsque les saints furent chassés du comté de Jackson (Missouri) à l’automne 1833, l’Église perdit deux éléments vitaux de la firme : l’imprimerie de William W. Phelps et le magasin de Sidney Gilbert. De plus, la Firme unie avait des dettes du fait de l’achat de marchandises pour les magasins, d’une nouvelle presse d’imprimerie pour Kirtland et de terres pour l’aménagement de Kirtland.

Le 11 janvier 1834, six membres de la firme, dont Newel K. Whitney, demandèrent au Seigneur de « fournir, selon l’ordre de sa providence, à l’évêque de cette Église, le moyen de régler, en temps utile, toutes les dettes encourues par la Firme15 ». Mais en avril 1834, Newel nota qu’il était endetté de huit mille dollars du fait de son rôle dans la firme. Il avait besoin d’au moins quatre mille dollars ce mois-là pour régler les dettes, le solde étant dû en septembre 183416. Devant ce tableau financier peu réjouissant, le prophète Joseph convoqua une réunion de la Firme unie le 10 avril 1834 durant laquelle il fut décidé que « la firme serait dissoute et que l’intendance de chacun lui serait déduite17 ».

Moins de deux semaines plus tard, le 23 avril 1834, le Seigneur donna à Joseph une révélation (maintenant Doctrine et Alliances 104) qui affectait ces « intendances » aux divers membres de la firme. Les intendances étaient des biens précis dont chaque membre de la firme devenait responsable. Par exemple, Newel K. Whitney reçut ses maisons et son magasin, les terrains sur lesquels ils se trouvaient, et le terrain où se situait sa fabrique de potasse. D’autres reçurent des terres et des bâtiments qui se trouvaient sur des propriétés appartenant à Frederick G. Williams et à John Johnson18. Bien que la révélation laissât entendre que la Firme unie continuerait après la distribution des intendances et une réorganisation de la firme, celle-ci cessa pratiquement de fonctionner par la suite. Par contre, le grand conseil de Kirtland, formé en février 1834, endossa le rôle de gestionnaire des travaux de commerce et de publication de l’Église19.

Dans les éditions suivantes des Doctrine et Alliances, la Firme unie fut appelée « l’Ordre uni » et des noms de code furent insérés à la place des noms des participants. De plus, le langage relatif aux objectifs de la firme fut modifié pour désigner plus vaguement le but de répondre aux besoins des pauvres. Ceci fut fait pour protéger l’identité des personnes impliquées dans la firme et pour préserver la confidentialité de ses objectifs. Le nom des personnes fut rétabli dans l’édition de 1980, mais la firme est toujours appelée l’Ordre uni dans l’édition 2013 des Doctrine et Alliances20.

L’investissement de Newel K. Whitney dans la Firme unie le laissa plus endetté, mais il ne manifesta jamais la moindre aigreur à l’égard de Joseph Smith ou du Seigneur à cause de cela. Il ne nota pas ses sentiments par rapport aux 3 600 dollars de dette qu’il remit, mais cet acte montrait qu’il était prêt à suivre le prophète, même dans les affaires temporelles. Son rôle dans la firme lui donna l’occasion de collaborer étroitement avec Joseph et d’autres dirigeants de l’Église pour donner à l’Église les moyens de mener sa mission à bien. La Firme unie joua un rôle indispensable dans la gestion de l’Église de 1832 à 1834, tout comme Newel joua un rôle indispensable dans la firme elle-même.