2023
Moins présent
Mars 2023


Souvenons-nous

Moins présent

Un jour, mon téléphone se mit à vibrer et je vis apparaître sur l’écran le message d’une amie, membre d’une paroisse à laquelle j’avais appartenu quelques années auparavant. Elle m’annonçait une nouvelle inattendue, celle du décès prématuré d’une membre de sa paroisse que j’avais aussi bien connue. Cette dernière venait de succomber lors d’une opération chirurgicale, à la suite d’un long combat contre le cancer du pancréas. À la lecture de son nom de famille, je ne me souvins pas instantanément de qui elle était. Puis, en relisant son prénom, son visage est apparu soudainement dans mon esprit, ainsi que des souvenirs de plus en plus clairs et précis.

Je me souvenais alors très bien du premier jour où elle avait franchi les portes de l’église un dimanche matin. Elle était accompagnée. Elle posait beaucoup de questions pertinentes et restait très prudente quant à la perspective de s’engager au baptême. Puis elle est revenue, semaine après semaine, devenant cette amie de l’Église fidèle et pratiquante, mais sans franchir le pas… jusqu’au jour, où elle a décidé de mettre sa vie en conformité avec les enseignements du Sauveur et d’entrer dans les eaux du baptême. Je la revoyais alors en blanc, souriante et rayonnante de joie. Je savais que cet engagement lui avait demandé beaucoup de courage, de sacrifices et de foi. C’était une personne très réservée, pleine de gentillesse dont on pouvait ressentir la sincérité de cœur, ainsi que le poids des difficultés rencontrées et des épreuves traversées dans sa vie. Par la suite, elle avait accepté des appels à servir dans la paroisse. Elle exerçait un travail prenant, mais restait toujours très discrète sur sa vie personnelle.

Le jour de ses obsèques, plusieurs membres de la paroisse étaient présents au funérarium, au milieu d’une centaine de membres de sa famille, de sa maman très âgée et veuve, de ses tantes, frères et sœurs, cousins et cousines, collègues de travail venus nombreux, ainsi que des voisins et amis ; la salle était pleine !

Durant la cérémonie œcuménique, plusieurs personnes ont pris la parole pour témoigner des qualités humaines et chrétiennes de notre sœur. Elle était bien aimée des siens et appréciée de tous ceux qui l’avaient côtoyée. Elle avait été à l’image du Christ. Des larmes, des sanglots, des émotions sincères émanaient de toutes les personnes présentes.

Une pensée m’a alors traversé l’esprit : notre sœur n’était pas venue à l’église depuis un moment et peut-être l’avions-nous pensée « moins pratiquante » !

Elle n’avait peut-être plus répondu au téléphone, elle était malade et ne voulait peut-être pas en parler. Elle avait d’autres combats à mener ou soucis à régler. La période COVID a isolé et éloigné beaucoup d’entre nous. La route menant à l’église est devenue plus lointaine, moins facile à reprendre. En écoutant la famille, les collègues de travail et les amis parler des belles qualités chrétiennes de notre sœur, comment aurions-nous pu la considérer comme « moins pratiquante » ?

Elle était certes « moins présente », mais plus que jamais « pratiquante ». Sa lumière avait brillé et illuminé le chemin du fidèle disciple entraînant tous ceux autour d’elle à voir la vie à la lumière de la vérité jusqu’au jour même de sa mort. Quelle belle vie, quel magnifique exemple, quelle grande leçon !

Au sein de nos paroisses et branches, combien de nos frères et sœurs âgés ou malades, affligés ou éprouvés, jeunes ou adultes, passent par des moments difficiles ou font des choix que nous ne pouvons comprendre ?

Quel grand défi d’apprécier chacun à sa juste valeur, surtout quand il s’éloigne de nos yeux !

En ressortant du cimetière, j’ai pris la décision de retirer de mon vocabulaire « les moins pratiquants ou moins ‘actifs’ ». Certains de nos frères et sœurs sont effectivement « moins présents », mais beaucoup d’entre eux sont « pratiquants » et brillent de la lumière radieuse du Christ. Peut-être pas comme nous l’imaginons ou le souhaiterions !

Chères sœurs, chers frères, vous êtes peut-être loin de nos yeux, mais devriez plus que jamais être « présents » dans nos cœurs, dans nos prières et nos actions.